Première histoire ♪

Chapitre 1

Dans le fin fond de la montagne, cachée sous la mousse verte, l’eau bleu turquoise clapotait joyeusement. Son Autre allait bientôt arriver, elle le sentait. Cela faisait si longtemps qu’elle attendait. De plus, il devait connaître un destin exceptionnel, même si il aurait beaucoup d’épreuves à surmonter …

Les feux de la voiture déchirèrent la nuit, sur la route de campagne. Il faisait chaud. Le cri des grillons résonnait dans les vignes. Les montagnes s’étendaient à perte de vue, recouvertes de sapins, et une bonne odeur de résine régnait dans l’air. Les lumières d’une maison brillaient au loin. La voiture s’y dirigea. Elle se gara devant l'entrée, les portières avant et la portière arrière gauche s’ouvrirent. Un homme, deux femmes. Deux silhouettes s’éloignèrent vers la maison, les bras chargés de bagages, tandis que la troisième ouvrit la dernière porte et en sortit un enfant endormi. Ils sonnèrent à la porte. Des bruits de pas, la clef tourne dans la serrure, et la porte s’ouvre. Un jeune homme apparaît, le sourire aux lèvres :
-Bonsoir tout le monde, vous avez fait bon voyage ?
-Très bien, merci Allan, répondit M Pnatt.
-Mais entrez, entrez donc, ne restez pas sur le pas de la porte !
-Je vais mettre Marc dans son lit, il en a bien besoin, dit Mme Pnatt en montant l’escalier.
- Donne, Aïda, je vais porter ta valise dans la chambre de Marie, dit Allan.
- Non merci, je peux le faire, répondit la jeune fille avant de monter à l’étage à son tour.
Allan fronça les sourcils, contrarié. Depuis trois ans qu’elle venait en vacances chez lui, il avait tout essayé pour se rapprocher d’elle, mais elle l’avait toujours repoussé. Pourtant, il voulait réessayer. Il était tombé amoureux d’elle dés le début, pris au piège par ses expressions, et sa bonne humeur. Mais depuis elle ne disait plus un mot. Enfin, a lui. S’en serait-elle rendu compte ? Tout à ces pensées, il avait conduit Joe Pnatt dans le salon et lui avait servi une bière. Ils commencèrent à discuter et Allan oublia un peu la jeune fille.

Aïda arriva, valise en main, dans la chambre de Marie, où elle dormait pendant les deux mois de vacances. La propriétaire était sur son lit, lisant un livre appelé « La Voie du Futur ». Marie adorait tout ce qui parlait du futur : boules de cristal, diseuses de bonne aventure, horoscopes, technologies, etc.… En entendant la porte s’ouvrir, elle leva les yeux, et sourit à la nouvelle venue :
-Aida ! Comment vas-tu ? Tu as fait bon voyage ?
- Oui, merci, Marie, mais en arrivant, ton frère m’a immédiatement sauté dessus.
-Ah ça, il est toujours sous ton charme, ça fait deux mois qu’il ne parle que de toi !
-Franchement je ne sais pas ce qu’il me trouve.
-Tu rigoles ? Tu es super belle, drôle et intelligente. Pas étonnant qu’Allan ait succombé !
- Mouais, je ne suis pas convaincue…
Tout en défaisant sa valise, Aïda se regarda dans le miroir. Elle avait des cheveux noirs reposants sur ses épaules, la peau bronzée, et de grands yeux bleus, ce bleu si particulier, qui apparaît sur la mer des Antilles les jours de soleil. Elle ne savait pas de qui elle les tenait. Elle était légèrement maquillée, pas trop grande, bien proportionnée. Néanmoins, comme beaucoup de filles de son âge, elle se trouvait horrible. Elle ne comprenait vraiment pas pourquoi Allan était tombé amoureux d’elle. Pourtant, au début, ils s’entendaient bien. Il avait été comme un frère pour elle. Puis, peu à peu, il avait changé. Il devenait plus tendre avec elle, la regardait d’une drôle de façon. Elle avait finit par découvrir la vérité, grâce à Marc. Mais ses sentiments à elle, eux, n’avaient pas changés. Et pourtant il ne manquait pas de charme. Hélas, elle était incapable de l’aimer. Et le seul moyen qu’elle avait trouvé pour ne pas lui donner d’espoir, c’était de l’éviter. Et ce n’était pas toujours facile. Sortant de ses rêveries, Aïda redescendit au rez-de-chaussée pour saluer M et Mme Dambour, les parents d’Allan et Marie. La conversation les entraîna jusqu’au salon où ils s’installèrent. Tout en s’asseyant, la jeune fille regarda ses parents : sa mère, blonde aux grands yeux verts, en léger surpoids : son père, roux aux yeux gris. Tout deux étaient pâles naturellement. Et, comme à chaque fois qu’elle les regardait, elle se demanda pourquoi elle était si différente d’eux… Après quelques temps, tout le monde partit se coucher, et la maisonnée s’endormit rapidement. Seul Allan resta éveillé, pensant à Aïda. Il aurait vraiment voulu se rapprocher d’elle. Je lui parlerai demain, se dit-il en se retournant dans son lit. A la minute même où il s’endormit, Aïda se réveilla en sursaut. Elle se leva, et admira la vue par la fenêtre ouverte. La lune brillait, simple croissant, sur le bois qui recouvrait le flanc de la montagne. Un village se nichait au creux de la vallée. Soudain, un éclair de lumière bleu illumina le paysage. Levant la tête, elle vit un point lumineux, de la même couleur que ses yeux, brillait aux milieux des étoiles. Et, aussi soudainement qu’il étai apparut, il disparut, la douce lueur de la lune éclairant de nouveau la scène. La jeune fille resta longtemps devant la fenêtre. Elle avait l’impression que le phénomène la concernait, et se sentait tendue, comme avant un exposé. Mais elle ne savait pas pourquoi. Elle finit par retourner se coucher, et s’endormit aussitôt.

L’eau scintillante observait le ciel. Le Lumineux est apparu, son Autre était proche, ils allaient bientôt être réunis. Le jour se lève, la lune se couche, c’est l’heure. L’eau scintillante redevint l’étang paisible.

Le soleil venait à peine de se lever quand la maisonnée s’éveilla. Les mères descendirent préparer le petit déjeuner tandis que les pères choisissaient les activités de la journée. Aïda partit s’occuper de Marc. Il était déjà habillé, et jouait derrière son lit. De là où elle était, elle ne voyait que sa tignasse blonde. Elle sourit. Elle le regarda pendant un moment, puis le prit par la main et l’emmena dans la salle à manger pour prendre le petit déjeuner. Tout le monde était là et bavardaient joyeusement. Dés qu’ils apparurent, Marc se précipita vers sa mère et Allan se leva pour tirer la chaise voisine de la sienne. La jeune fille leva les yeux au ciel et alla s’asseoir à son opposé. Le petit déjeuner continua, résonnant de bruits de conversations et de rire d’enfants. Au début de la matinée, tous partirent vaquer à leurs occupations. Aïda et Marie partirent dans le village pour faire du shopping avec des amies à Marie. Elles rentrèrent juste pour le déjeuner. Dès qu’elles passèrent la porte, Allan attrapa Aïda par le bras et lui demanda s’il pouvait lui parler. Après un dernier regard vers Marie, la jeune fille le suivi dans sa chambre. Il referma la porte dès qu’elle fut entrée, et s’approcha d’elle, si près qu’elle dû lever les yeux pour voir son visage. Il se penchait vers elle, comme pour l’embrasser. L’éclat de ses yeux, plein de gravité, lui fit monter les larmes aux yeux. Pourquoi donc était-elle incapable de l’aimer ?
- Je voudrais savoir, dit-il dans un souffle, ce que tu ressens exactement pour moi.
- Je ne t’aime que comme un grand frère, répondit Aïda après un moment, je n’ai  jamais rien ressenti d’autre. Je suis désolée, murmura-t-elle en baissant les yeux, avant de sortir de la chambre en courant.


Allan resta seul, les yeux fermés. Il s’y était attendu, mais c’était quand même douloureux. Au moins ne le détestait-elle pas. Il comprenait mieux maintenant pourquoi elle l’évitait : pour ne pas le faire souffrir, lui donner de l’espoir. Mais il n’allait pas abandonner. Il allait tout faire pour se faire une place dans son cœur. Pour l’instant elle le considérait comme son frère, et bien il serait ce frère. Et bientôt, il deviendra plus…

Après le dîner, M Dambour déclara a tout le monde qu’il avait quelque chose à leur montrer. Avec des airs mystérieux, faisant taire les questions, ils les invita à le suivre et s’éloigna vers les vignes en contrebas de la maison. Intrigués, toute la petite troupe lui emboîtât le pas. Aïda resta à la traîne, repensant à son entrevue dans la chambre d’Allan. Pourquoi donc était-elle incapable de l’aimer ? Elle savait qu’elle le faisait souffrir, mais elle ne pouvait pas faire autrement. Que c’est deux mois de vacances allait être long …Coupant ces pensées, la jeune fille accéléra le pas et rattrapa Marie, qui était impatiente de connaître la surprise de son père. Et soudain, quelques minutes plus tard, M Dambour s’arrêta et se retourna vers son assistance, un sourire aux lèvres.
- Voilà, nous sommes arrivés. Vous allez recevoir un choc.
Et il s’engagea sous un enchevêtrement de branches. Aïda le suivit immédiatement, et ce qu’elle vit lui coupa le souffle. 


Chapitre 2 


- Alors, n’est-ce pas magnifique ? , dit M Dambour.
- Si, c’est grandiose, dit Mme Pnatt.
Ils se dispensèrent pour mieux explorer l’endroit. Chacun était émerveillés, l’air retentissait de cris de surprise. Mais deux personnes n’avait pas bougé : Aïda et Allan. Ce dernier était paralysé. Il était, comme les autres, rester bouche bée devant la beauté de l’endroit, mais en même tant, il lui donnait la chair de poule. Tout, ici, lui rappelait Aïda ; La couleur de l’eau, les buissons de fleurs, la forme des arbres, partout où il regardait, il reconnaissait des choses qui la caractérisaient : le bleu de ses yeux, l’odeur de sa peau, son visage paisible. Il avait l’impression d’être entrer à l’intérieur d’elle. Il ne comprenait pas pourquoi cet endroit lui faisait cet effet-là. Il jeta un rapide coup d’œil à Aïda, et vit qu’elle était encore plus bouleversée que lui.

La jeune fille restait figée. Elle avait l’impression, d’être dans un rêve, car ce paysage, elle l’avait effectivement vu en songes. Elle se souvenait de chaque touffe d’herbe, de chaque feuille. Elle se sentait chez elle ici, plus que partout ailleurs. Mieux, elle avait l’impression de ne faire qu’un avec lui. Et de nouveau, elle eut hâte tout en ayant peur, mais elle ne savait pas pourquoi. Du coin de l’œil, elle perçut Allan qui lui jetait un regard furtif ; Un vague d’irritation la submergea, qui l’étonna elle-même : Pourquoi voulait-elle qu’il s’en aille ? Puis elle se rendit compte que ce n’était pas exactement ce qu’elle voulait : elle désirait rester seule. Elle ne savait pas ce qu’elle ferait à ce moment-là,, mais qu’une fois seule, elle le saurait ; mais déjà les autres s’éloignaient, Marc l’appelait. A contrecœur, elle se détourna et rejoignit le groupe. Quitter cet endroit lui donnait l’impression de s’arracher le cœur. Mais elle s’y résigna et se promit d’y revenir plus tard.

L’eau scintillante jubilait. Pour la première fois, elle avait enfin pu voir son Autre. Elle l’avait observée, avait vu son visage passer de la stupeur à la joie, puis à la résignation. Elle l’avait vu partir, en traînant les pieds. Elle l’avait immédiatement reconnu à ses yeux. Bleu azur, comme elle. Elle avait ressenti toutes ses émotions, avait perçu son obstination à revenir. Elle n’avait pus qu’à attendre que la Transformation opère. Et alors, elles ne feront plus q’un…


Soucieux, Allan marchait silencieusement. Le reste du groupe bavardaient joyeusement. Mais lui, il ne pouvait s’empêcher de repenser à la clairière. Pourquoi donc cet endroit lui rappelait tant Aïda ? Il en était sûr, elle n’y était jamais venue. Il avait vu l’émerveillement se peindre sur son visage, comme sur celui des autres. Elle n’avait jamais était capable de jouer la comédie. Alors, pourquoi… Mais ils avaient déjà atteint la maison. Allan rangea toutes ses questions dans un coin de sa tête et prit part à la conversation.


Une demi-heure plus tard, Allan, Marie et Aïda étaient installés dans la chambre de Marie, en parlant de profs et d’autres choses. Allan fixait Aïda d’un regard perçant, la mettant mal à l’aise. Elle se tortillait sur son coussin, quand il lui posa une question qui la prit au dépourvu :
- Dis-moi Aïda, tout à l’heure dans la clairière, j’ai eu l’impression d’entrer dans ton intimité, comme si c’était une partie de toi. Qu’est-ce que tu en penses ?
Tandis que Marie ouvrait des yeux ronds, Aïda fixa à son tour Allan dans les yeux. Ils restèrent silencieux pendant quelques minutes. La jeune fille se morfondait intérieurement. Zut, il s’en était aperçu aussi ! Elle aurait tellement aimé pouvoir partager ses émotions avec eux, mais une sensation inconnue lui ordonnait de se taire. Elle ne comprenait pas d’où lui venaient toutes ses pulsions, qui ne lui appartenaient pas. Néanmoins, elle n’avait pas le choix ; elle devait mentir. Alors elle prit un air soucieux, et dit d’une voix qu’elle voulait posée :
- Je n’en sais rien, je n’avais jamais vu un endroit pareil.
- Mais tu es sûre qu’il ne te rappelle rien, insista le jeune homme ?
- Oui, parfaitement sûre, répondit sèchement la jeune fille, et maintenant j’aimerai qu’on change de sujet.
Et ce fut les derniers mots sur ce phénomène. Allan eut beau essayé de reprendre la conversation, le regard d’Aïda le glaçait sur place. Mais il pensait bien qu’elle aussi était inquiète, et qu’elle se posait les mêmes questions que lui, mais elle ne voulait pas le partager. La semaine passa, mais jamais Allan ne réussit à parler de l’endroit. Quant à Marie, elle semblait avoir oublié toute l’histoire.

Le dimanche soir, alors qu’Aïda regardait les étoiles depuis son lit, un éclair de lumière semblable au premier traversa le ciel. Mais, cette fois, il y eut une différence : une voix parlait dans sa tête, l’appelait. «  Viens à moi, viens jusqu’à l’Eau Scintillante, n’aie pas peur, je suis là, je vais t’aider, viens à moi, viens en mon royaume » c’était comme un chuchotement, mais qu’elle entendait clairement. Et de nouveau, elle ressentit ce mélange d’empressement et de peur. Elle savait où aller. Elle se leva de son lit, descendit l’escalier et sortit de la maison. Elle s’éloignait mécaniquement, comme sous hypnose.


Allan se dissimulait du mieux qu’il pouvait derrière un arbre. La lune éclairait tout comme en plein jour. Il vit une silhouette avancer sur le chemin. Que faisait Aïda dehors à cette heure de la nuit ? Il sortait de la salle de bain quand il avait entendu un bruit de pas au rez-de-chaussée. Craignant des cambrioleurs, il était aussi silencieusement que possible, armé d’un livre, au cas où. Mais il s’était vite rendu compte que ce n’était qu’Aïda. Il sourit dans l’obscurité. Qu’elle était jolie, dans sa chemise de nuit bleue ! Puis, peu à peu, il se rendit compte qu’elle avait un comportement bizarre. Elle était plantée au milieu du salon, les yeux tournés vers la lune. Elle semblait…écouter. A deux reprises, elle acquiesça d’un air assuré, alors qu’aucun son n’avait percé le silence de la maison. Puis, d’un coup, elle se dirigea vers la porte d’un lourd, monotone. Après une légère hésitation, Allan décida de la suivre. Il pensait qu’elle faisait une crise de somnambulisme, mais à présent il en doutait beaucoup : en effet, elle marchait d’un pas rapide et semblait savoir exactement où elle allait. Elle se fondit dans l’obscurité de la forêt, si bien qu’il la perdit. En essayant d’accélérer, il se prit les pieds dans une racine, et son crâne vint heurter une pierre. La douleur lui fit lâcher un cri, le monde tourna, et il perdit connaissance.


« Viens à moi, viens vers l’Eau Scintillante, n’aie pas peur, je te guiderai, et bientôt nous ne ferons plus qu’un… » L’esprit d’Aïda était comme connecté à ces paroles. Aucune autre pensées n’existaient pour elle, elle ne pouvait faire qu’une chose : marcher jusqu’à la source de la voix. Et c’est ce qu’elle fit. Elle déboucha finalement sur la clairière à l’eau turquoise, cette clairière qu’elle avait vu en rêve, à cause de laquelle elle avait dû mentir à ses amis, qu’elle avait tant voulu revoir et qu’elle contemplait enfin. Mais cette fois était différente. L’obscurité l’environnait de partout, seule l’eau semblait étinceler. Lorsque la jeune fille tourna son regard vers cette lumière, elle vit un spectacle qui lui rendit immédiatement sa lucidité : l’eau semblait être faite de pierres précieuses, elle bouillonnait et pourtant ne débordait pas. Assise sur un rocher, une jeune fille était là, qui regardait Aïda. Tout son corps était formé par l’eau, elle semblait être aussi fragile qu’un voile, mais Aïda sentait qu’elle pouvait se transformer en tempête sous l’effet de la colère. Elle était magnifique et terrible à la fois. Aïda avança d’un pas et ouvrit la bouche pour parler quand elle entendit son nom. Elle se retourna et vit avec étonnement Allan se précipiter vers elle, pressant son haut de pyjama sur sa tête. Il s’arrêta net en voyant la fille d’eau et écarquilla les yeux.

Allan n’avait jamais rien vu de pareil, il croyait rêver. Une personne comme ça ne pouvait pas exister ! Soudain, la fille d’eau s’envola de son rocher et s’approcha de lui. Il recula, mais il n’alla pas assez vite ; Dés qu’elle fut devant lui, elle fredonna une chanson d’une voix mélodieuse, et il se sentit tout d’un coup plus fatigué. Ses membres semblaient lourds. Il résista un instant, puis s’écroula sur le sol.


Chapitre 3


En voyant la jeune fille d’eau s’approcher d’Allan, Aïda n’avait pas bougé, fascinée. Mais à la vue d’Allan s’effondrant, elle ne pu s’empêcher de pousser un cri. Elle se précipita vers lui, et se rendit compte avec soulagement qu’il n’était qu’endormit. Rassurée, elle se tourna vers l’apparition, qui la regardait tendrement en flottant dans les airs.
- Qui êtes-vous ? demanda-t-elle.
- Je suis l’incarnation vivante de cet étang. Je vis par et pour lui. On me nomme l’Eau Scintillante, dit une voix qui semblait venir de nulle part.
- Mais pourquoi m’avez-vous fait venir ici ? Que me voulez-vous ?
- Je t’ai fait venir ici car tu es mon Autre, celle qui devra s’unir à moi pour ne former plus qu’un, afin de rejoindre la contrée des Ailiés.
- Comment ? Mais pourquoi ? Que voulez-vous dire par « ne former plus qu’un » ? Et qui sont les Ailiés ?
- Tu comprendras quand le moment sera venu.
Et l’Eau scintillante pénétra le corps de la jeune fille. Aïda eut l’impression de plonger dans l’eau, le bruit résonnait à ses oreilles, alors qu’aucune goutte d’eau ne la touchait. Elle comprit que ce bruit venait de l’intérieur d’elle-même. Elle attendit, abasourdie, que cela cesse. Mais, loin de là, elle sentit en elle comme un tourbillon, qui se mit à grossir. Très vite, il fut tellement gros qu’elle eut l’impression de tourner avec lui. Ses pieds quittèrent le sol, elle entendit un cri, puis sombra dans l’inconscience.

Allan regardait, horrifié, la jeune fille décoller vers le ciel. Elle semblait avoir perdu connaissance, les bras étendu dans un geste gracieux, comme une danseuse. Soudain, elle se mit à luire, et un tourbillon émergea de son corps, du même bleu que l’étang, et l’entoura. Pendant quelques instants, il ne la vit plus, puis le tourbillon disparut d’un coup, et elle redescendit. Comme elle était dans l’ombre, il ne la voyait pas. Terrorisé, il n’osa pas bouger. Quand elle se releva, il vit une vague forme sombre, beaucoup plus grande qu’un humain. Alors, la panique l’emporta, et il partit en courant. Un cri fusa dans la nuit.
- Non, Allan !
C’était la voix de la jeune fille, elle n’avait pas changé. Néanmoins, il était terrifié parce qu’elle était devenue, et ne se retourna pas.
- Non, ne t’en vas pas, reste avec moi, s’il te plaît ! Suppliait-elle.
Et soudain, ce fut comme si quelque chose lui avait obéi. Tous ses vêtements lui pesaient lourd sur le corps, le clouant au sol. Puis, au bout de quelques secondes, il se sentit tirer en arrière, de plus en plus vite, pour arriver devant ce qui était devenu Aïda. Il la vit alors pur la première fois dans la lumière. Il en resta bouche bée.


Aïda avait reprit conscience au moment où elle avait touché le sol. Elle s’était relevée péniblement, son corps lui semblait plus lourd qu’auparavant. Pendant toute la transformation, elle avait été inconsciente, mais à présent elle sentait cette chaleur dans ses veines, ce pouvoir. En s’observant sous toutes les coutures, elle réalisa que son corps avait changé et sa perception avait changé. Ses sens s’étaient développés. Sa peau avait un air vaguement bleutée. Soudain, un bruit retentit, et elle se retourna et vit Allan s’enfuir. Une vague de panique la submergea, et elle le supplia de revenir. Malgré cette fantastique sensation de puissance, elle avait peur et avait besoin d’aide. Elle tendit la main vers lui, et soudai il se figea. Elle comprit que c’était elle qui avait fait ça. Lentement, elle ramena sa main vers elle, et Allan la suivit. Une fois devant elle, la jeune fille le vit écarquiller les yeux.



Aïda était extraordinairement belle. Ses cheveux, nattés, reposaient sur son épaule droite. Sa peau était légèrement bleue. Ses yeux semblaient plus grands, plus beaux, presque…magiques. Elle portait un chemisier et un pantalon de cuir de la couleur de l’étang. Deux  ailes gigantesques de la même couleur dépassaient dans son dos. Elles faisaient deux fois la taille de la jeune fille, qui semblait ne pas les avoir remarquer. Dans le creux de son cou, comme un pendentif, un signe illuminé, tel une flaque de lumière, pulsait. Aïda s’éloigna un peu d’Allan, le laissant libre de ses mouvements. Mais il n’avait plus envie de s’enfuir, il voulait rester avec elle, l’admirer encore. Aussi la regarda-t-il sans un mot.

Aïda n’en croyait pas ses yeux. Elle observait son reflet dans l’eau de l’étang. Mais qu’était-elle devenue ? Une voix dans sa tête lui répondit :
- Tu fais maintenant parti de la confrérie des Ailiés, peuple du ciel. Tu dois découvrir tes pouvoirs et les maîtriser, et alors tu pourras rejoindre le pays des Nuages. Et maintenant, tu dois retourner à la vie normale pour quelques temps. Toi et ton ami, dormez.
Et la jeune fille sentit comme un nuage se poser sur ses épaules, elle glissa au sol et s’endormit paisiblement, aussitôt suivi par Allan.


Le lendemain matin, Aïda se réveilla dans son lit. Le soleil brillait au-dehors. Elle resta longtemps les yeux ouverts, à se remémorer les évènements de la nuit en se demandant si tous ça n’avait été qu’un rêve. Finalement, elle se leva et gagna la salle de bain. Au moment où elle vit son reflet dans le miroir, elle comprit que tout était réel. Ses yeux étaient si grands, si bleus, ils semblaient magiques. Ses cheveux étaient ondulés, comme si elle les avait nattés. Et même si ses vêtements et ses ailes avaient disparus, la tache lumineuse était toujours là. Elle étincelait, comme si elle était un saphir. Désireuse de s’éviter des questions sur le bijou elle prit au hasard une écharpe accrochée derrière la porte et s’en drapa. Evidemment, celle-ci était bleue. La jeune fille descendit alors prendre son petit déjeuner. Personne ne remarqua qu’elle dissimulait soigneusement son cou. Risquant un coup d’œil, elle vit Allan qui la fixait. Il semblait, comme elle, se demander si les évènements de la nuit étaient réels. Mais elle ne pouvait pas le confirmer. Elle sentait au fond d’elle-même qu’il serait en danger s’il connaissait la vérité. Alors elle évita soigneusement de croiser son regard et continua à manger en silence. Le reste des vacances s’écoula sans autres incidents étranges. Alla se rapprocha peu à peu d’Aïda, réussissant même à redevenir comme à leur première rencontre, ce qu’Aïda avait voulu retrouvé depuis le début. Personne ne s’étonna des étranges yeux d’Aïda, ni de son curieux bijou, qu’elle avait fini par montrer. Puis ce fut le moment du départ. Après avoir embrassé tout le monde, Aïda enlaça Allan, qui la serra avec tant de force qu’elle crut qu’elle allait mourir étouffé. Quand il la lâcha enfin, il lui fit un sourire timide, qu’elle rendit. Elle monta alors dans la voiture qui démarra et s’éloigna.

Allan regarda la voiture disparaître au loin. D’habitude, à ce moment-là, il se demandait toujours comment faire pour se rapprocher de la jeune fille. Mais cette fois, quelque chose avait changé. Il sentait qu’il ne lui était plus aussi indifférent qu’avant. Si c’était vrai, alors il ferait tout pour que cet amour grandisse. Et même si cette nuit-là s’était réellement déroulée, elle n’en restait pas moins Aïda Pnatt.

- Tu viens, Allan ?
- Oui, maman, je vais juste faire un tour à pied et je reviens.
- Si tu veux, mais ne reste pas trop longtemps, il commence à faire nuit.
- D’accord à tout de suite.
Et il partit d’un pas rapide à travers les vignes. Au bout d’un quart d’heure environ, il avait rejoint la clairière magnifique, celle qu’il avait reconnu dans son « rêve », si s’en était bien un. Il avança vers l’eau, toujours aussi bleu, qui s’écoulait tranquillement. Mais, peu à peu, il entendit un écoulement de gouttes assez régulier, comme si quelqu’un pleurait. Il regarda autour de lui, puis finit par voir un rocher creux. Il s’approcha et regarda à l’intérieur de la cavité. Il eut alors un choc : Un buste d’Aïda y reposait ! Il semblait être en pierre, mais cette pierre semblait presque transparente. La statue la représentait les cheveux posés sur ses épaules, comme lorsque elle était partie. Les yeux étaient aussi beaux que les vrais. Des gouttes d’eau coulaient sur ses joues. Allan eut alors la bizarre impression que c’était ce que faisait la véritable Aïda. Troublé, il se releva et s’éloigna et, tout à ses pensées, ne vit pas le gigantesque trou dans le sol devant lui, et s’arrêta net avant d’y tomber. On aurait dit qu’un immense papillon au corps humain était tombé ici. En un éclair, il revit Aïda, dotée de ses ailes s’écrouler sur le sol. Alors il ne douta plus que tout ce qu’il avait vu était la réalité.


Chapitre 4


Aïda regardait le paysage défiler derrière la vitre. Des larmes coulaient sur ses joues. Elle ne s'était pas rendu compte qu'elle tenait autant à Allan, le quitter avait été terriblement dure.Lorsqu'elle l'avait serré dans ses bras, elle avait eu envie de lui dire à quel point elle l'aimait, mais le regard qu'il lui avait lancé lui avait fait comprendre qu'il le savait déjà. Finalement, c'est Marie qui avait raison : il avait changé de tactique pour se rapprocher d'elle, et ça avait marché à merveille. Maintenant elle ne peut plus se passer de lui. Il avait été pour elle un grand frère, et il lui manquait. Du moins avait-elle encore son petit frère. La jeune fille se tourna vers lui et le regarda tendrement. Soudain, une idée lui traversa la tête : Était-il vraiment son frère ? Elle avait découvert qu'elle avait des ailes, un drôle de bijou, qu'elle appartenait à un autre peuple et qu'elle devait maîtriser ses pouvoirs, qui d'ailleurs n'avaient manifesté aucun signe. Ce pouvait-il qu'elle est été adoptée ? Non, elle avait vu les photos à la maternité, et ses yeux étaient reconnaissables. Alors ? Un échange de bébés, comme dans les films ? Et si c'était le cas, où étaient ses parents, sa famille ? Elle se dit qu'elle mènerait sa petite enquête. Il fallait aussi qu'elle découvre ses pouvoirs. De quoi était-elle capable ? Pouvait-elle disparaître, séduire les gens, lire dans les esprits ? Elle s'imagina un instant lançant des boules de feux, puis elle reprit son livre et se replongea dans l'intrigue.

Allan était allongé dans l'herbe, le visage tourné vers le buste d' Aïda. Il avait regardé, fasciné, les larmes s'arrêter de couler, le sourire étirer les lèvres, puis l'expression de concentration. Il avait déjà compris que cette statue figurait les émotions de la jeune fille, même si il ne savait pas pourquoi ni comment. Mais la statue serait un atout précieux. Dès qu'Aïda aurait besoin de lui, il le saurait et pourrait l'aider. Et vue les larmes qui constellaient son visage quand elle était partie, il semblerait que le jeune homme lui manque. Il se remit debout et rentra chez lui, le sourire aux lèvres. Si Aïda tombait amoureuse de lui, les prochaines vacances serait féeriques. Cette pensée ne le quitta pas de toute la soirée.

La voiture s'arrêta à nouveau devant une maison, tard le soir. Mais cette fois, elle était silencieuse et obscure. De nouveau, trois portières s'ouvrirent. les trois silhouettes se dirigèrent vers la maison, après avoir prit les valises et le petit garçon. Rapidement, ils se dispersèrent dans la maison, qui s'illumina. Aïda monta dans sa chambre avec sa valise. Elle n'eut pas la force de la défaire, et se résolut à se déshabiller et à se coucher.Elle s'endormit immédiatement. Ses rêves furent flous, comme caché derrière un voile, la seule image nette dont elle se souvienne à son réveil est un nuage enlaçant ses chevilles, comme pour la protéger. Elle s'était réveillé d'un coup, cette image encore incrustée sur la rétine. Il faisait grand jour. Elle resta un long moment assise, à observer sa chambre. Elle était peinte en lavande avec une moquette blanche. Son lit était placé sous la fenêtre, au milieu de la pièce, ce qui lui permettait de tout voir en  même tant. A sa droite, une armoire et une commode occupait tout l'espace. La commode débordait de bibelots et de boîtes en tous genres qui renfermaient ses bijoux. Une boîte pour les colliers, une pour les boucles d'oreilles, une pour les bracelets, une pour les bagues, tout était classé méticuleusement. A sa gauche, une gigantesque bibliothèque débordante de livre, un porte CD et une chaîne hi-fi dernier cri. A ses pieds, une chaise qui supportait son sac de cours et ses vêtement de la veille. En face, près de la porte, se trouvait son bureau, où se trouvait ses affaires scolaires. La pièce était bien rangée, mais pas à la perfection. C'était son univers. Finalement, elle se leva et descendit prendre son petit déjeuner. Ses parents, déjà levés, l'embrassèrent.
- Ah au fait, dit son père, il y a une lettre pour toi. Je suppose que c'est Laure, étant donné qu'elle t'écrit toujours au moment où on revient.
Aïda sourit. Laure était sa meilleure amie. Elles se connaissaient depuis l'école primaire, où Aïda avait empêcher un garçon de la frapper, car Laure n'avait pas la langue dans sa poche. Elle ne s'était plus quitté depuis... Après son petit déjeuner, elle remonta dans sa chambre pour lire la lettre et rédiger une réponse. Elle rit aux éclats à l'évocation du moment de frousse de son amie. C'était bien Laure, ça ! Agir d'abord et réfléchir ensuite. Mais que pouvait-elle lui répondre ? Elle ne savait pas si elle pouvait lui parler de la transformation. De toute façon personne ne s'était rendu compte des changements jusque là. Après quelques réflexions, elle décida de ne pas lui parler de la nuit de l'étang avec Allan, mais elle lui parla des éclairs de lumières et de ses sentiments pour Allan. Elle lui donna rendez-vous  à leur endroit habituel,puis ferma la lettre, mit l'adresse et le timbre et descendit au village pour la poster. Sitôt de retour dans sa chambre, elle entreprit de rager ses affaires. Bientôt, son lit fut submergé de vêtements, qu'elle rangeait au fur et à mesure. Une fois cela fait, elle s'installa à son bureau, sortit son crayon à dessin et une feuille blanche et s'adossa à son siège, tout en mâchouillant son crayon, en quête d'inspiration. Elle promena à nouveau son regard sur sa chambre, et croisa son reflet dans le miroir accroché sur la porte de l'armoire, et décida de dessiner l'étrange motif de son cou. Il était assez complexe, mais elle en vint à bout en une demi-heure. Dés que le dernier trait fut tracé, le dessin s'illumina et ses pierres se mirent à luire, comme si elles étaient vraies. Aïda observait le phénomène bouche bée, quand elle entendit un coup timide à sa porte. Vite, elle retourna la feuille, mit son bras dessus et demanda à la personne d'entrer. C'était Marc.
- Aïda, tu veux faire un Uno avec moi ?
La jeune fille sourit et le suivit au salon. Ils passèrent l'après-midi en partie de cartes, éclats de rires et chamailleries. Le soir venu, Ils partirent en famille faire un bowling, si bien qu'Aïda revint tard dans la soirée, exténuée. Elle se coucha et s'endormit aussitôt.

Le Chasseur d'Ailiés était à l'affût. la transformation avait eu lieu. Il avait vu le Signe dans le ciel, il avait senti le pouvoir effluer vers le nouveau Ailié. Il s'était immédiatement rendu sur le lieu de la métamorphose, mais n'y avait rien trouvé d'intéressant, sauf une chose : un humain y avait assisté, un humain qui, d'après les traces devant la Statue Révélatrice, était amoureux de l'Ailié. qui semblait être une jeune femme, une Ailiée, donc. S'il retrouvait l'humain, il localiserait l'Ailiée car, il le sentait, elle n'était plus dans la région. Il fallait qu'il soit attentif aux pensées des gens alentour. Cette idée l'agaça, car les pensées des humains n'étaient pas intéressantes. Il regarda la magnifique clairière, désormais vide de pouvoir magique, avec mépris, puis s'évanouit dans la nature.

Quelques jours plus tard, quand Aïda se réveilla, le temps était toujours au beau fixe. Cette fois, elle ne s'attarda pas. Elle descendit prendre son petit déjeuner et retourna dans sa chambre pour se préparer. Après avoir vérifié qu'elle avait bien son sac, son téléphone, son porte-monnaie, ses lunettes, son chapeau et sa bouteille d'eau, elle parti pour la place principale du village. Laure et elle se donnaient toujours rendez-vous au café de la place. Laure était déjà là, et sautillait sur son siège. la patience n'avait jamais été son fort... Elle passèrent la matinée à discuter en se promenant, puis, après un rapide sandwich, elle prirent un bus pour se rendre à la ville la plus proche, afin de faire les boutiques. Quand elles revinrent, elle partirent dans la campagne environnante, se perchant sur leur colline préférée. A leurs pieds s'étalait tout le village. Elles y demeurèrent jusqu'au soir.

Le Chasseur d'Ailiés était assis sur un rocher, dans unes des collines situées au nord de Marseille. Il écoutait le flot des pensées des habitants des environs. Cela faisait des jours et des nuits qu'il épiait, et il n'avait toujours rien trouvé. Néanmoins, il persévérait.Et enfin, il finit par trouver. Une image lui apparut, une Ailiée de couleur bleue. Elle provenait d'un rêve émis par un adolescent qui habitait à deux cent mètres de la clairière. Le Chasseur sourit. Il avançait vers son but.       

Chapitre 5

Allan rêvait. Il revoyait toute la scène de la transformation. L'éclair de lumière, le moment où Aïda se releva, tout. Puis soudain, son rêve disparut, comme aspiré. Il se réveilla en sursaut, se redressa dans son lit et regarda droit devant lui, fixant son regard sur son affiche de foot. C'était là ses gestes habituels en se réveillant, après des rêves agités : se replonger dans sa la réalité. Mais cette fois fut différente. Un homme se tenait debout au pied de son lit. Il le fixait de ses pupilles froides, et complètement noires. Il était tout vêtu de noir, et ses cheveux étaient noirs également. Terrifié, Allan tenta de reculer, mais l'autre fut plus rapide. Il bondit, attrapa l'adolescent par le cou et , juché sur le lit, le plaqua au mur. Le jeune homme, estomaqué, tenta de se libérer, mais la poigne de l'homme était telle qu'il eut beau tirer, il n'obtint aucun résultat. Il avait l'impression de s'acharner sur un bloc de béton.
- Qui êtes-vous ? demanda-t-il d'une voix étouffée.
- Tu n'as pas besoin de le savoir. Tu as juste à m'obéir et à répondre sagement à mes questions.
L'homme parlait d'une voix profonde, menaçante, et le jeune homme sentit un frisson de peur parcourir son échine.
- Que me voulez-vous ? parvint-il à articuler.
- Je veux savoir où se trouve l'Ailiée.
La peur passa dans les prunelles d'Allan. Que voulait cette homme à Aïda ? Il voulut d'abord nier, mais la poigne de fer et le regard de l'homme l'en dissuadèrent. Alors il lui dit, ma mort dans l'âme, l'adresse exacte de la jeune fille. L'homme le lâcha et disparut en un éclair. Immédiatement, Allan se jeta sur son portable et composa le numéro d'Aïda.


La jeune fille était profondément endormie quand son portable sonna. Qui donc pouvait l'appeler en plein milieu de la nuit ? Elle attrapa son téléphone et décrocha.
- Allô ? dit-elle d'une voix ensommeillée
- Aïda ? Excuse-moi de te réveiller, mais il fallait absolument que je te parle. Tu es en danger.
D'après le ton de sa voix, Allan semblait terrifié et avait peine à respirer. Sans laisser à la jeune fille le temps de dire un mot, il lui raconta toute la scène. A la fin du récit, Aïda était complètement réveillée. Son visage était blême.
- Tu es sûr que tu n'as pas rêvé ? demanda-t-elle, et sa voix dérailla sur la fin de la phrase.
- Absolument sûr, je porte encore les marques sur mon cou.
- Mais que me veut-il ?
- je n'en sais rien, mais j'ai vu dans ses yeux une lueur de vengeance...Quoi qu'il en soit, ce qui importe, c'est de te protéger. Qu'est-ce que tu comptes faire ?
- Ne t'en fais pas pour moi, je vais me débrouiller.
Aïda s'était ressaisi, elle avait décidé de se débrouiller seule, et d'assumer son destin, mais elle ne voulait qu'Allan soit en danger.
- Mais, protesta-t-il...
- Non ne ne t'inquiète pas, tout ira bien. Je te rappelle demain.
Et elle lui raccrocha au nez. mais malgré son assurance, elle n'avait aucune idée. Elle resta longtemps assise dans son lit, attentive à chaque bruit. Mais rien de suspect ne se produisit. Mais elle décida quand même de se cacher, par précaution. Elle installa son traversin et son oreiller dans son lit, de façon à ce qu'on croive qu'une personne y dormait, puis tirale matelas de derrière son armoire, le plaça sous son bureau, le cacha du mieux qu'elle put et se recoucha. Elle s'endormit rapidement. Mais l'homme ne se montra pas, ni cette nuit ni les suivantes. les jours passèrent, et Aïda oublia peu à peu le danger.

Le Chasseur d'Ailiés jubilait. Enfin, il l'avait trouvé ! Il allait enfin pouvoir accomplir sa vengeance. mais il n'allait pas la tuer tout de suite, non, il allait la faire souffrir, si bien que c'est elle qui le suppliera de la tuer. Et lui, dans sa grande magnanimité  lui accorderait cette demande. mais, pour cela, il allait devoir la surveiller. Tout connaître de ses faits et gestes, ses amis, ses connaissances, ses envies, ses loisirs, ses talents, ses habitudes, ses défauts, ses qualités. Ses points faibles. Il sourit, ravi de son idée. De son poste d'observation, il vit la lumière de l'Ailiée s'allumer. Il ne la quitterait plus.

Aïda se préparait pour aller en cours. Cela faisait deux semaines qu'elle était entrée au lycée. Elle y avait retrouvé tous ses camarades de classe, et sa vie se déroulait normalement, avec ses petits problèmes quotidiens. Elle n'avait toujours pas découvert ses pouvoirs, et e s'en souciait pas. Tout cela dura encore un moment, jusqu'à ce fameux jour où tout bascula...
Le soleil était encore chaud, Laure et Aïda avait décidé d'aller se baigner dans la rivière qui coulait au sud du village. Une fois rendu dans leur coin favori, elles étendirent leurs serviettes et se précipitèrent dans l'eau, en s'aspergeant d'eau, dans de grands éclats de rire. Après s'être bien amusées elles revinrent à leurs affaires et s'allongèrent au soleil. Elles observèrent le ciel sans nuages, repérant les oiseaux. Aïda se disaient qu'elle aimerait beaucoup être un oiseau. Elle ferma les yeux, et s'imagina en train de voler dans le ciel. Aussitôt, elle sentit comme une onde de chaleur de chaleur lui traverser le corps, à l'identique de celle qu'elle avait ressenti lorsque de la transformation et du retour d'Allan : La magie.

Laure n'en croyait pas ses yeux. Elle étai tranquillement allongée au soleil avec sa meilleure amie Aïda, quand le corps de cette dernière s'était mis à pulser d'une lumière bleue éblouissante, si bien que la jeune fille ne put le supporter. Quand cette lumière se fut éteinte, Laure regarda son amie, mais celle-ci n'était plus là. A sa place se tenait une magnifique hirondelle aux yeux bleus. Ceux d'Aïda. Elle rapprochait sa tête de l'animal quand l'impossible se produisit : il se mit à parler. la jeune fille bondit en arrière, ramassa ses affaires, et s'apprêta à déguerpir quand les mots de l'oiseau prirent soudain un sens:
- Laure, n'est pas peur, c'est moi, Aïda, ton amie.

Aïda était au comble de la joie. Elle venait de découvrir son premier pouvoir ! Elle se délectait de se nouveau corps, si souple, si léger, et se réjouissait à l'idée de tous les formes qu'elle pourrait prendre. Elle volait au-dessus de Laure, qui marchait d'un pas ferme vers la maison d'Aïda. Celle-ci se renfrogna. Après avoir fait la peur de sa vie à son amie, la jeune fille avait dû jurer de tout lui raconter une fois rentrées.  Et en effet, elle lui raconta tout, depuis la transformation jusqu'à l'homme qui avait agressé Allan. Laure resta silencieuse pendant un long moment, ce qui était inhabituel chez elle. Aïda attendait patiemment qu'elle digère la nouvelle.
- Si j'ai bien compris, tu es une Ailiée, une personne non humaine qui doit découvrir ses dons pour retourner dans son pays d'origine. Et aujourd'hui, tu viens de révéler ton premier pouvoir : tu peux te métamorphoser, finit par dire Laure pensivement.
- Oui c'est ça, répondit Aïda avec prudence, car quand son amie parlait ainsi, cela annonçait toujours des mauvaises nouvelles.
- Mais tu ne peux devenir qu'un oiseau, ou alors ça fonctionne avec tous les animaux ? Et les objets ? Faisons des tests !
Pendant une heure, Aïda dût se métamorphoser en toutes sortes d'objets et d'animaux. A la fin de la journée, elle se savait capable de se transformer en n'importe quoi, sauf un autre humain.

Le Chasseur était nerveux. Il avait senti que l'Ailiée venait de découvrir son premier pouvoir, et que celui-ci était extrêmement puissant. Si ses deux autres pouvoirs étaient aussi puissant, il ne savait pas si il serait capable de l'affronter, il risquait d'être vaincu. Mais tout n'était pas encore joué. Pour l'instant, rien n'était encore sûr, son plan pouvait encore se dérouler comme prévu.

Allan était en train de réviser quand Aïda l'appela. Il l'écouta relater sa découverte de l'après-midi, lui posa quelques questions, puis raccrocha. Son coeur battait à tout rompre. Il venait de se rendre compte qu'Aîda le considérait comme son confident, ce qui n'était pas pour lui déplaire. Bien au contraire...

Chapitre 6

Aïda dormait profondément. Elle rêvait. Des tas de couleurs, de formes abstraites et de sons véhiculaient dans son esprit, jusqu'à ce que tout devint sombre, et un home surit, assis en tailleur e les yeux fermés. Soudain, il les ouvrit, la fixa de ses prunelles d'un noir d'encre, et parla d'une voix forte :
- Ailiée, tu es à ma merci. Tu ne peux échapper à ma vengeance. Ce que tes Géniteurs m'ont faits est impardonnable, et j'en resterait à jamais blessé. Je veux les faire souffrir tout autant, ce qui est maintenant possible grâce à toi. 
Et il s'élança vers elle avec un rire terrifiant. La jeune fille se réveilla en sursaut. Elle retrouva avec soulagement les meubles familiers de sa chambre. le rire de l'homme résonnait encore dans sa tête. Qui était-il ? Était-ce lui qui avait attaqué Allan ? Qui étaient ses Géniteurs ? Qu'avaient-ils put faire à cet homme pour qu'ils les détestent au point qu'elle, alors qu'ils ne se connaissaient pas, puissent devenir une arme contre eux ?


Le Chasseur était inquiet. Il se trouvait sur un rocher surplombant la maison de L'Ailiée, écoutant les pensées des gens des environs, quand, en s'attardant sur celles de sa proie, il avait surprit une vision le concernant, qui dévoilait toutes ses intentions. Il se doutait que l'Eau Scintillante avait pénétré la conscience de sa protégée pour la prévenir. Cela le contrariait, car d'après ce qu'il entendait, la jeune fille ferait tous pour savoir qui il était, et l'homme savait qu'elle le saurait un jour ou l'autre... Mais il avait encore un peu de temps devant lui, car elle ne pourra vraiment entreprendre des recherches qu'une fois sur Orrir. Il devait donc agir vite.


Allan dormait quand son téléphone sonna. En décrochant il entendit des sanglots apeurés. Mais ils furent vite remplacés par la voix tremblotante d'Aïda. A toute vitesse, elle lui raconta son étrange rêve. Il la rassura, et après avoir raccroché, ne put s'empêcher de jeter un oeil à la statue. Le visage de pierre était crispé de terreur. la poitrine se soulevait brutalement, comme si la jeune fille avait du mal à reprendre son souffle. De grosses larmes coulaient sur ses joues. Puis, soudain, elle prit une grande inspiration, ferma les yeux et, peu à peu, s'endormit. Rassuré, le jeune homme passa tendrement la main sur la joue de la statue, et c'est alors que tout autour de lui s'estompa et il se retrouva à voler au-dessus de la mer. Au loin, une île se profilait, seul point de terre au milieu de cette immensité d'eau. A peine eut-il le temps d'apercevoir la plage de sable fin qu'il s'enfonçait déjà dans l'épaisse forêt. Bientôt, il se retrouva dans la clairière familière. L'Eau Scintillante se tenait devant lui.
- Prend garde à toi, Humain. Tu cours un grand danger. Mais si tu réussis ce que tu es sensé faire, alors tu auras plus que ce que tu voudras.
Et alors il reprit connaissance, allongé sur le parquet de sa chambre.
à suivre...